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01/25/2022 | Press release | Distributed by Public on 01/25/2022 11:49

Conseil de sécurité: Protection des civils en période de conflit armé

(Le résumé complet sera disponible plus tard dans la journée.)

PROTECTION DES CIVILS EN PÉRIODE DE CONFLIT ARMÉ - LA GUERRE URBAINE ET LA PROTECTION DES CIVILS - S/2022/23

Déclarations

Rappelant que plus de 50 millions de personnes sont aujourd'hui touchées par des conflits en milieu urbain, M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l'ONU, a souligné que si les dommages causés aux civils sont souvent prévisibles, les parties au conflit ne prennent pas toujours de mesures pour les éviter ou les réduire. « Lorsque des armes explosives sont utilisées dans des zones habitées, environ 90% des personnes tuées ou blessées sont des civils », a insisté le Secrétaire général avant de noter que l'utilisation d'armes explosives en milieu urbain comporte un risque élevé de conséquences aveugles.

Illustrant son propos, M. Guterres a cité le cas de Gaza, où des dizaines d'écoles et de centres de soins ont été endommagés lors des combats en 2021. Près de 800 000 personnes ont perdu l'accès à l'eau courante, ce qui a accru le risque de maladies tout en entravant davantage les soins de santé, a-t-il ajouté. En Afghanistan, une attaque aux explosifs devant un lycée de Kaboul en mai dernier a entraîné la mort de 90  élèves, principalement des filles, et fait 240  blessés, a-t-il encore cité avant de mettre l'accent sur les souffrances physiques et psychologiques. Il a aussi cité une étude réalisée en 2020 au Yémen qui a montré que l'utilisation d'armes explosives lourdes dans les zones habitées avait perturbé l'ensemble des ressources et des systèmes du pays. « De l'Afghanistan à la Libye, de la Syrie au Yémen, et au-delà, les risques pour les civils augmentent lorsque des combattants circulent parmi eux et mettent des installations et du matériel militaire à proximité d'infrastructures civiles. »

Mettant l'accent sur les conséquences à long terme des conflits urbains, le Secrétaire général a précisé que quatre ans après la destruction de 80%  des habitations à Mossoul, en Iraq, on estime que 300 000 personnes sont toujours déplacées. Le Secrétaire général a aussi souligné le danger que représentent les engins non explosés, qui empêchent les gens de rentrer chez eux après la guerre, avant de souligner l'impact de la destruction massive dans les zones urbaines qui fait reculer le développement de plusieurs décennies, sapant les progrès vers les objectifs de développement durable.

Pour prévenir et atténuer les terribles effets des conflits urbains sur les populations, le Secrétaire général a fait trois propositions. Premièrement, il a appelé toutes les parties à pleinement respecter le droit international humanitaire (DIH), en rappelant que les attaques contre des civils ou des infrastructures civiles, les attaques aveugles et l'utilisation de civils comme boucliers humains sont interdites. Il a aussi jugé indispensable de poursuivre les auteurs des violations graves avant d'insister pour que les États Membres aient la volonté politique de mener, dans toute la mesure du possible, des enquêtes et des poursuites concernant les crimes de guerre présumés, chaque fois qu'ils se produisent. « Nous le devons aux victimes et à leurs proches, et c'est également crucial afin que cela soit un moyen de dissuasion puissant. »

Deuxièmement, le Secrétaire général a exhorté les parties à adapter leurs armes et leurs tactiques lorsqu'elles font la guerre dans les villes, car elles ne peuvent pas se battre dans des zones habitées comme elles le feraient sur des champs de bataille ouverts. Par conséquent, il a exhorté toutes les parties belligérantes à s'abstenir d'utiliser des armes explosives à large rayon d'impact dans les zones habitées.

Troisièmement, il a demandé aux parties d'évaluer l'impact de leurs opérations, d'examiner les moyens de minimiser les dommages causés aux civils et de garantir l'obligation de rendre compte, la reprise et la réconciliation. Les parties à un conflit doivent veiller à ce que leurs forces armées soient formées à suivre ces politiques et pratiques, et tous les États devraient établir des cadres directifs nationaux pour la protection des civils, qui s'appuient sur ces politiques et pratiques, a insisté le Secrétaire général avant d'exhorter les États Membres à user de leur influence sur leurs partenaires et alliés afin de garantir le respect du DIH et l'adoption de bonnes pratiques.

Enfin, il a exhorté tous les membres du Conseil à demander des mesures de protection spéciales et à utiliser tous les moyens à leur disposition pour mettre fin aux dommages tragiques et évitables causés aux civils.

M. PETER MAURER, Président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a fait état de preuves irréfutables des dommages inacceptables de la guerre urbaine pour les civils. L'urbanisation des conflits a des impacts sur les infrastructures de base interconnectées, a-t-il remarqué ajoutant que le droit international humanitaire (DIH) est complexe et passe par des orientations sophistiquées. Le CICR est aux avant-postes en cas de guerre et ne ménage aucun effort pour aider les groupes armés et les États à prendre les bonnes décisions, mais in fine ce sont aux parties qu'il revient de prendre les décisions finales, a concédé M. Maurer.

Il a appelé les parties aux conflits à travailler à un meilleur respect du DIH et à son adaptation aux conflits d'aujourd'hui, notamment aux guerres urbaines. Il faut une interprétation de bonne foi du droit régissant les hostilités, a-t-il précisé. M. Maurer a également exprimé les inquiétudes du CICR quant à l'utilisation des engins explosifs en zones densément peuplées, ce qui fait l'objet d'un nouveau rapport avec des recommandations pratiques et une série de mesures comme le concept d'évitement.

Le Président du CICR a encore recommandé que les efforts visant à faire de la protection des civils une priorité stratégique dans les opérations militaires urbaines tiennent également compte du fait que les parties à un conflit armé combattent rarement seules: une multiplication d'acteurs étatiques, multinationaux et non étatiques vient en soutien direct ou indirect aux parties dans les conflits armés contemporains. Cela peut conduire à une diffusion des responsabilités, qui accroît les risques pour les civils, les blessés et les détenus, a remarqué M. Maurer. L'influence de ces acteurs sur les partenaires, alliés ou mandataires des parties doit être utilisée pour faire une différence positive dans les moyens et les méthodes de guerre employées en milieu urbain, a-t-il plaidé. Le CICR continue d'appeler les États Membres à agir de manière plus décisive pour améliorer leur propre action et tirer parti de leurs relations privilégiées avec leurs alliés et partenaires pour renforcer le respect du DIH.

M. Maurer a poursuivi en soulignant l'urgence qu'il y a à adopter et mettre en œuvre des mesures pour protéger les services essentiels. Le CICR n'est que trop familiarisé avec les impacts graves et cumulatifs sur les populations lorsque les services essentiels sont endommagés pendant un conflit, a-t-il fait remarquer.

Investir dans des mesures préventives pour assurer la continuité des services essentiels offre une garantie supplémentaire pour la santé publique des civils, a poursuivi M. Maurer. « Cela est particulièrement pertinent au moment où nous sommes confrontés à la double vulnérabilité d'un conflit armé et d'une urgence de santé publique mondiale. » M. Maurer a aussi recommandé que les efforts en ce sens soient intégrés dans une approche plus holistique pour reconstruire en mieux et renforcer la résilience des services essentiels afin d'assurer un accès inclusif et équitable par les civils. Les donateurs devraient adopter des mécanismes permettant un financement pluriannuel plus flexible pour éviter l'effondrement des services essentiels et réduire le risque d'inversion du développement, tout en renforçant la réponse d'urgence à court terme pour répondre aux besoins des individus, a-t-il aussi souhaité. Par conséquent, il a exhorté le Conseil à mettre en œuvre les engagements fermes contenus dans sa résolution 2573 (2021) et à faire en sorte que les sanctions permettent au personnel humanitaire d'éviter l'implosion des services de base.

M. Maurer a également appelé à intensifier les efforts pour atténuer la faim et l'insécurité alimentaire et prévenir la famine dans les conflits urbains prolongés. La guerre urbaine crée des situations d'insécurité alimentaire en perturbant les chaînes d'approvisionnement alimentaire et les marchés. Ce problème ne peut être résolu uniquement par des secours à court terme, a-t-il martelé en suggérant une action précoce et anticipée. Il a aussi appelé à protéger les personnes déplacées, notamment en cas de guerre urbaine, et à leur fournir logement et nourriture, en faisant en sorte que les familles ne soient pas séparées. Les parties à un conflit peuvent aider à prévenir l'insécurité alimentaire en respectant le DIH, notamment les règles protégeant les cultures, le bétail, les installations hydrauliques et autres objets indispensables à la survie de la population contre les attaques.

Face à des guerres qui changent rapidement de nature, M. Maurer a constaté que nous peinons à nous adapter et à prendre des mesures adéquates. Nous devons garder les personnes au centre de notre action et établir un engagement significatif avec les personnes déplacées et les communautés d'accueil tout en mettant davantage l'accent sur la dignité et la résilience et en envisageant l'éventail complet des solutions durables, a-t-il conclu.

M. PACOME MOUBELET BOUBEYA, Ministre des affaires étrangères du Gabon, a relevé que les populations civiles sont souvent prises en otage dans les conflits, ce qui interroge le droit de la guerre. Il a également noté que les guerres ont un caractère plus interne qu'international et opposent souvent des acteurs asymétriques. Les zones urbaines aujourd'hui sont l'équivalent des jungles dans les conflits des années 70, rendant inopérants certains moyens, a déclaré le Ministre. Il a indiqué que, lorsque les villes sont pilonnées, 90% des victimes sont des civils, relevant en outre que la guerre urbaine concerne 50 millions de civils dans le monde et tue trois fois plus de personnes qu'un conflit en zone rurale. Il a exhorté la communauté internationale à apporter une réponse urgente à ce défi. Le Ministre gabonais a aussi questionné la légalité de l'emploi d'engins explosifs en zone urbaine même si ces engins ne sont pas expressément prohibés par les textes. Les parties belligérantes ont une obligation de précaution, a-t-il insisté, en ajoutant que l'emploi de ces engins paraît difficilement compatible avec le DIH. Il a enfin appelé à repenser la réponse humanitaire en soulignant l'importance de répondre aux besoins de manière holistique et de mettre en œuvre une « décentralisation de la diplomatie humanitaire ». Les villes sont destinées aux civils et ne doivent pas devenir le théâtre de conflits, a conclu le Ministre.

Mme LANA NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a constaté qu'en raison de l'augmentation de l'urbanisation, en particulier dans les milieux fragiles, et la densité accrue des villes, la guerre urbaine est devenue plus complexe et le principe fondamental de distinction plus difficile à appliquer pour les parties à un conflit armé. Certains groupes armés non étatiques exploitent cet environnement difficile et choisissent délibérément les villes comme champ de bataille principal au mépris total de la vie humaine, a-t-elle dénoncé, accusant notamment les houthistes et d'autres organisations terroristes de délibérément cibler des civils et des biens civils, d'utiliser des écoles et des infrastructures civiles pour stocker des armes ou lancer des attaques, et de se servir des civils, y compris des enfants, comme boucliers humains.

La représentante a appelé au plein respect du droit international, le jugeant d'autant plus essentiel dans l'environnement complexe de la guerre urbaine en raison de ses conséquences dévastatrices sur les civils et les infrastructures essentielles. La formation, le renforcement des capacités et le partage des meilleures pratiques avec les parties engagées dans un conflit armé peuvent contribuer à renforcer la conformité avec le droit international, a fait valoir Mme Nusseibeh. Relevant en outre que les sanctions peuvent soit dissuader, soit contraindre les acteurs à se conformer au droit international, elle a souligné que ces sanctions doivent être soigneusement conçues afin de garantir que les acteurs humanitaires puissent continuer à effectuer leur travail essentiel en milieu urbain.

Elle a exhorté la communauté internationale à soutenir les efforts de relèvement rapide et de reconstruction pour rétablir les infrastructures critiques et les services de base qui sont endommagés et perturbés par l'impact des hostilités dans les villes. La pandémie actuelle rend cet engagement d'autant plus critique que le plus lourd tribut des conflits urbains est payé par les enfants, a-t-elle indiqué. Saluant la résolution 2601 (2021) qui souligne l'importance de la continuité de l'éducation dans les conflits et le potentiel de la technologie, la représentante a appelé à développer et à soutenir des moyens permettant aux enfants de poursuivre leur éducation, même en temps de conflit, arguant que c'est essentiel pour leur développement et contribue à la réalisation de la paix et de la sécurité. Mme Nusseibeh a également jugé crucial que les femmes et les filles soient autonomisées de manière à leur permettre de participer pleinement et sur un pied d'égalité aux stratégies de protection et de reconstruction, car leur inclusion dans tous les secteurs -public et privé- est essentielle pour un relèvement efficace, ainsi que pour aider à prévenir la résurgence des conflits.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que, face à la gravité des conséquences humanitaires des conflits, en particulier pour les populations civiles en zone urbaine, la réponse de la communauté internationale doit prendre quatre directions. Tout d'abord, a-t-il dit, le Conseil de sécurité doit demeurer pleinement mobilisé pour que les parties respectent leurs obligations au titre du DIH et des droits de l'homme. Appelant à la mise en œuvre des résolutions sur la protection des civils, il a aussi encouragé tous les États Membres à endosser l'Appel à l'action humanitaire présenté par la France et l'Allemagne en septembre 2019. Il a par ailleurs demandé qu'une meilleure protection des acteurs et des infrastructures humanitaires et médicaux soit assurée, avant de condamner les attaques de ce type effectuées en violation du DIH, y compris dans le cyberespace.

Jugeant primordial que la protection des civils reste au cœur des opérations de maintien de la paix, le représentant a souhaité que les mandats de ces opérations prennent en compte l'analyse des menaces contre les civils, notamment les menaces de violence sexuelle et sexiste et les menaces de violations graves contre les enfants et leurs droits. Il a enfin estimé que les attaques et les violations contre les personnes et des infrastructures civiles ne peuvent rester impunies. Selon lui, l'action du Conseil contre le recours massif et indiscriminé aux engins explosifs improvisés ainsi que contre l'utilisation de civils comme boucliers humains doit être renforcée, tout comme la coopération avec les missions d'établissement des faits, les commissions d'enquête et les instruments de la justice pénale internationale. Le délégué a également réitéré son appel à une meilleure utilisation des sanctions contre les responsables de ces actes, indiquant que conformément à son engagement sur ces questions, la France a pris l'initiative, conjointement avec la Commission européenne, d'organiser le premier Forum humanitaire européen, qui se tiendra du 21 au 23 mars de cette année.

M. XXXXX (Inde) a indiqué que la prise pour cible de civils et d'infrastructures civiles est une tactique de guerre qui a été employée dans de nombreux conflits, et qu'à mesure que l'urbanisation augmente, l'impact des conflits sur les personnes vivant dans les villes augmentera aussi. Il a noté que certains pays continuent de subir les conséquences d'actions ciblant délibérément les civils et qui équivalent à un génocide comme cela a été le cas en 1971, dans ce qui est maintenant le Bangladesh. Il a déclaré que les États ont la responsabilité de protéger ceux qui risquent leurs vies pour protéger les civils. « En d'autres termes, nous devons protéger les protecteurs. »

Préoccupé du fait que les parties à un conflit armé considèrent les populations et infrastructures civiles comme des cibles légitimes, le délégué a déclaré que son pays a toujours été en première ligne dans la lutte antiterroriste. Tout débat sur la protection des civils est incomplet s'il ne prend pas en compte le carnage causé par les groupes terroristes, en particulier ceux qui sont parrainés par des acteurs étatiques, a déclaré le délégué, en citant l'attaque odieuse perpétrée à Bombay en 2008. Il a, en conséquence, exhorté la communauté internationale à rejeter toute tentative visant à justifier le terrorisme, alertant en outre que baisser la garde se ferait non seulement ressentir sur les civils, mais aussi sur les forces de sécurité qui combattent ces groupes dans des conditions extrêmement difficiles en milieu urbain. Le représentant a par ailleurs réaffirmé le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures d'un État. La menace d'utiliser la force contre un État doit être fermement condamnée, a-t-il insisté. Il a également attiré l'attention sur l'importance de fournir une aide aux pays dont l'infrastructure urbaine a été détruite, précisant qu'à l'issue du conflit au Sri Lanka, l'Inde a contribué à la construction de plus 46 000 habitations pour personnes déplacées.

Au nom du Groupe des amis de la protection des civils dans les conflits armés, réseau interrégional de 27 États Membres, Mme XXX (Suisse) a fait observer que, selon le rapport 2021 du Secrétaire général, la grande majorité des victimes des conflits armés en milieu urbain sont des civils, avec des effets négatifs à long terme et systémiques sur les services de santé et d'éducation de base. Fort de ce constat, elle a insisté sur l'importance de respecter le droit international humanitaire (DIH) et la nécessité de renforcer la protection des civils, notamment des impacts humanitaires qui pourraient survenir lorsque des armes explosives sont utilisées dans des zones peuplées. À cet égard, la représentante a salué l'adoption de la résolution 2573 (2021) sur les attaques contre les infrastructures critiques et a réitéré l'appel du Groupe à éviter, dans la mesure possible, d'établir des positions militaires à l'intérieur ou à proximité de zones densément peuplées.

La déléguée a ensuite souligné l'importance de la mise en œuvre du DIH au niveau national, ce qui nécessite, selon elle, des mesures à la fois en temps de paix et de conflit armé. La doctrine et la pratique militaires devraient servir de base pour le développement de la compétence militaire en matière de protection des civils, a-t-elle affirmé, avant de préconiser l'inclusion d'une formation spécifique et du développement de bonnes pratiques dans la planification et la conduite des opérations militaires dans les villes pendant les conflits armés. Plaidant aussi pour que toutes les parties à un conflit soient informées du DIH, elle a recommandé de ne pas criminaliser les contacts menés à cette fin avec les groupes armés.

De même, a-t-elle ajouté, il demeure crucial que toutes les parties aux conflits armés autorisent et facilitent les activités humanitaires, tout comme il importe de garantir la participation et le leadership des femmes et des filles dans les processus humanitaires. À ce sujet, la représentante a plaidé pour que les acteurs humanitaires et de développement adoptent des approches globales, en particulier pour faire face aux conflits armés prolongés dans les zones urbaines. Enfin, après avoir appelé à faire en sorte que les villes restent des espaces de vie et d'espoir, même en période de conflit armé, elle a réaffirmé l'engagement de la Suisse, candidate à un siège non permanent au Conseil de sécurité, pour la protection des civils dans les conflits et la pleine mise en œuvre du DIH.

M. ALEXANDER MARISCHIK (Autriche) a noté, bien que le phénomène de la guerre dans les villes ne soit pas nouveau, l'impact de la guerre urbaine a récemment gagné en ampleur, les populations étant plus nombreuses à vivre dans des villes et ces dernières abritant des infrastructures. Avec l'augmentation des guerres urbaines, la communauté internationale peut maintenant voir clairement son impact humanitaire dévastateur, a-t-il relevé, jugeant inacceptable que près de 90% des victimes des guerres urbaines soient des civils et que 50 millions de civils soient touchés par ce type de conflits. Constatant qu'un « schéma commun » à de nombreux conflits en milieu urbain est la violation du droit international humanitaire (DIH), le représentant a appelé toutes les parties à un conflit armé à s'y conformer pleinement « en toutes circonstances », notamment pour ce qui est de l'utilisation d'armes explosives dans des zones peuplées.

Le représentant a ensuite observé que l'impact humanitaire des conflits urbains prend non seulement la forme de blessures ou de morts résultant d'explosions mais aussi des formes indirectes car ces explosions perturbent les infrastructures essentielles et la fourniture de services. À ses yeux, les destructions d'écoles et les enfants qui restent à la maison par crainte d'attaques à l'arme explosive ne doivent pas être négligés, compte tenu des effets sur l'accès à l'éducation. L'Autriche a souligné son engagement sur cette question lors de la Conférence sur la protection des civils dans la guerre urbaine à Vienne, a-t-il indiqué, affirmant attendre avec impatience une « déclaration politique forte », à l'issue des négociations menées par l'Irlande. Saluant les réponses apportées par le Conseil de sécurité, ces dernières années, à ces défis urgents, notamment par l'adoption à l'unanimité de la résolution 2573 (2021) sur la protection des infrastructures essentielles à la survie des civils, il a souhaité qu'à l'avenir, l'organe onusien se concentre sur la mise en œuvre de ce texte tout en tenant compte des besoins spécifiques des populations urbaines. Enfin, il a appelé le Conseil à maintenir son appel à un accès sans entrave des travailleurs humanitaires aux villes des zones de conflit. Dans ce contexte, il a condamné fermement l'utilisation de la famine comme méthode de guerre dans les conflits armés, une pratique pouvant, selon lui, être assimilée à un « crime de guerre ».

M. OLOF SKOOG, de l'Union européenne, a déclaré que la responsabilité première de protection des civils incombe aux acteurs engagés dans des guerres en milieu urbain. Il a donc exhorté ces parties belligérantes à respecter le droit international humanitaire, en prenant dûment compte des défis spécifiques liés aux conflits en zone urbaine. Il s'est dit vivement préoccupé par l'emploi d'engins explosifs dans les zones densément peuplées, y compris les zones situées près des hôpitaux, des écoles et des universités. Il a salué l'Irlande pour le processus de consultation inclusif lancé sur ce sujet de protection des civils en zone urbaine en vue d'aboutir à une déclaration politique.

M. Skoog a invité le Conseil à jouer un rôle de chef de file s'agissant de la protection des civils en zone urbaine. L'application des résolutions pertinentes du Conseil, en particulier la résolution 2601 (2021) sur la protection de l'éducation en temps de conflit, doit faire l'objet d'une supervision adéquate, a dit le délégué. Il a aussi jugé crucial de créer un espace suffisant pour que les acteurs humanitaires puissent opérer en temps de conflit. Les donateurs et les acteurs du développement et humanitaires doivent jouer un rôle clef dans l'élaboration de la réponse à apporter aux conséquences de long terme des conflits en zone urbaine, a conclu M. Skoog.

M. ARIEL PENARANDA (Philippines) a demandé une posture plus proactive face aux techniques de guerre employées en zone urbaine et souhaité des opérations militaires plus responsables. Il a appelé les pays contributeurs de troupes à donner la priorité à la protection des civils lorsque ces derniers font face à un danger et ce, par tous les moyens nécessaires, dans le respect de la Charte et du droit international. Les tâches de protection doivent être claires, liées à des stratégies politiques et axées sur la prévention. S'agissant de l'emploi d'armes modernes en zone urbaine, il a souhaité que les États s'engagent en faveur d'une stratégie d'atténuation des risques pour les civils. Un « système avancé de guidage des munitions » est un outil efficace pour répondre aux défis volatiles et complexe de la guerre urbaine, a-t-il estimé.

Le délégué a rappelé que son pays adhère pleinement aux principes d'humanité, de neutralité, d'impartialité et d'indépendance dans l'apport de l'aide humanitaire. Il a aussi rappelé les obligations qui incombent aux parties belligérantes de respecter le droit international en toutes circonstances, en soulignant l'engagement fort de son pays en faveur de l'application des Conventions de Genève. Il est crucial de renforcer la coopération entre les Nations Unies et les pays hôtes en ce qui concerne les efforts de planification, l'échange d'informations et l'évaluation des risques relatifs à la sécurité du personnel onusien, a-t-il ajouté. Enfin, le représentant des Philippines a indiqué que son pays entend renforcer sa présence au sein des opérations de paix onusiennes.

à suivre…