Results

UN - United Nations

10/03/2023 | Press release | Distributed by Public on 10/03/2023 14:30

Troisième Commission

Troisième Commission

(Le résumé complet de la réunion sera disponible plus tard dans la journée.)

PROMOTION DES FEMMES (A/78/220, A/78/256, A/78/292)ET SUITE DONNÉE AUX TEXTES ISSUS DE LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET DE LA VINGT-TROISIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE (A/78/206, A/78/216)

Déclaration liminaire suivie d'un dialogue interactif

M. DANIEL SEYMOUR, Directeur de la Division des partenariats stratégiques d'ONU-Femmes, a présenté quatre rapports du Secrétaire général concernant laviolence à l'égard des travailleuses migrantes (A/78/292), l'amélioration du sort des femmes et des filles en milieu rural (A/78/220), l'amélioration du statut des femmes dans les organismes des Nations Unies (A/78/206) et les mesures prises et progrès réalisés dans le cadre du suivi et de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d'action de Beijing et des textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l'Assemblée générale (A/78/216).

Sur la base de ces différents rapports, le Directeur a tout d'abord fait observer que l'absence de voies de migrations régulières peut multiplier les risques d'abus envers les femmes et les exposer à des violences. Il a ensuite souligné le besoin d'améliorer les données statistiques en présentant une ventilation par sexe des données concernant la traite des personnes, ainsi que la situation des femmes et des filles dans les zones rurales. Notant par ailleurs que les femmes représentent désormais 47% des employés du Secrétariat des Nations Unies, il a constaté que les femmes sont encore sous-représentées au niveau des administrateurs en position intermédiaire ou élevée.

Dialogue interactif

À la suite de cette présentation, les États-Unis se sont alarmés de l'incidence disproportionnée des technologies de l'information et des communications (TIC) sur les groupes vulnérables ainsi que des discriminations croisées que subissent les personnes en situation de handicap. Sur cette base, ils ont souhaité avoir un aperçu des actions entreprises par ONU-Femmes pour éviter d'autres reculs en matière du droit des femmes au niveau international. Comment peut-on renforcer la collecte de données ventilées pour élaborer des politiques qui « font la différence? » s'est pour sa part enquise la Colombie, avant de demander des exemples concrets de discrimination à l'encontre des femmes et filles rurales et migrantes. À sa suite, une déléguée de la jeunesse de l'Italie a voulu savoir quelles étaient les exemples de pratiques optimales de stratégies visant à assurer une alimentation de qualité aux femmes et filles en milieu rural au regard de leurs vulnérabilités liées au genre et aux changements climatiques. La Roumanie a elle souhaité connaître les mesures à prendre au niveau local pour lutter contre les stéréotypes profondément ancrés et la violence domestique en vue de l'autonomisation des femmes rurales dans leurs communautés.

L'Ordre souverain de Malte s'est quant à lui intéressé à la santé menstruelle, une question selon lui « oubliée jusque-là car taboue », alors que 500 millions de femmes et de filles font l'objet de discrimination dans l'accès aux ressources dont elles ont besoin, ce qui limite leur participation au système éducatif et au marché du travail.

Observant que le nombre de femmes adultes âgées est en augmentation, le Chili a ensuite voulu savoir comment placer cette catégorie au centre des programmes. Il a également demandé si le traitement de la question du travail non rémunéré des femmes peut contribuer à diffuser de manière transversale l'égalité entre les sexes dans les politiques économiques. De son côté, le Mexique a demandé l'aide d'ONU-Femmes dans ses efforts de restructuration et de révision de sa politique extérieure féminine, se prononçant pour une plus grande reconnaissance de l'égalité entre les sexes en tant que composante de la promotion des droits humains et du développement durable. Par ailleurs, après avoir évoqué le sort des femmes ukrainiennes fuyant la guerre d'agression contre leur pays, la Pologne a souhaité connaître les priorités et objectifs d'ONU-Femmes pour les femmes et les filles dans des contextes de conflit.

L'Union européenne, qui appuie l'organisation d'une manifestation de haut niveau « Beijing +30 » en 2025, a voulu savoir comment s'assurer que cette réunion complète les engagements pris. Dans quelle mesure ONU-Femmes peut-elle systématiser les différents mandats sur l'égalité entre les sexes et comment les États Membres peuvent-ils contribuer et appuyer cette synergie? a demandé le Costa Rica. Enfin, la Lettonie a voulu connaître les partenariats les plus difficiles à mettre en place et les principaux obstacles rencontrés par ONU-Femmes dans la mise en œuvre de son mandat.

Reprenant la parole, le Directeur de la Division des partenariats stratégiques d'ONU-Femmes a appelé à avancer en s'appuyant sur les avantages comparatifs des États Membres et en renforçant la coopération au niveau intergouvernemental. Évoquant le trentième anniversaire du Programme d'action de Beijing, il a plaidé pour une intensification de la collaboration entre les États Membres afin de parvenir autant que possible à des conclusions adoptées par consensus. M. Seymour a par ailleurs indiqué qu'ONU-Femmes a mené une étude dans 20 pays du Nord et du Sud qui fait apparaître que les jeunes hommes adoptent trop souvent des attitudes régressives en matière d'égalité femmes-hommes. Enfin, il a souligné l'importance de l'autonomisation et du soutien des femmes en temps de crise, indiquant que financer leurs besoins permet de réduire la mortalité infantile, d'accroître la scolarisation des enfants et d'améliorer la prise en charge des personnes âgées ou handicapées.

Déclaration liminaire suivie d'un dialogue interactif

Mme ANA PELÁEZ NARVÁEZ, Présidente du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, a indiqué que l'année écoulée a été marquée par la tenue de dialogues avec 24 États parties, et l'adoption d'observations finales sur leurs rapports, évitant ainsi une nouvelle augmentation du retard accumulé, au vu des 45 rapports encore en attente d'examen. Le Comité a aussi adopté 11 listes de questions concernant les rapports des États parties et 12 listes de questions préalables à la présentation de rapports, au titre de la procédure simplifiée de présentation de rapports. Sur les 189 États parties à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, seuls 13 se sont retirés de la procédure simplifiée depuis la décision du Comité, en 2022, d'en faire la procédure par défaut pour la soumission des rapports périodiques, a informé la Présidente.

Le Comité a donné suite à 11 plaintes individuelles et constaté des violations des droits des auteurs dans six cas. En vertu de l'article 8 du Protocole facultatif, il a également effectué une visite d'enquête confidentielle dans un État partie et demandé à effectuer des visites dans les pays dans le cadre de plusieurs procédures d'enquête en cours.

La Présidente a ensuite fait part de l'adoption, en octobre 2022, de sa trente-neuvième recommandation générale sur les droits des femmes et des filles autochtones. Celle-ci reconnaît que ces dernières sont confrontées à des formes croisées de discrimination et fournit aux États parties des orientations pour promouvoir la participation des femmes et des filles autochtones à la vie politique et publique.

Actuellement, le Comité élabore sa quarantième recommandation générale sur la représentation égale et inclusive des femmes dans les systèmes décisionnels, dont l'adoption est prévue à l'automne 2024. Le Comité fournit aussi aux États parties des orientations sur la mise en œuvre de sa trente-cinquième recommandation générale (2017) sur la violence sexiste à l'égard des femmes.

La Présidente du Comité a ensuite dit être profondément préoccupée par l'utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre. Récemment, a-t-elle confié, un mécanisme de l'ONU a contacté le Comité pour réclamer un rapport exceptionnel à un État partie, où la violence sexuelle liée au conflit serait endémique dans les camps de personnes déplacées.

En octobre 2022, a-t-elle poursuivi, le Comité a examiné le neuvième rapport périodique de l'Ukraine qui l'a invité à effectuer une visite technique de suivi dans le pays. Une invitation qu'il compte honorer dès que le soutien logistique nécessaire pourrait être assuré, a promis Mme Peláez Narváez. Et en janvier, le Comité a publié sur son site Internet une réponse des autorités de facto de Kaboul à sa demande d'informations sur la situation des femmes et des filles en Afghanistan.

S'agissant de l'harmonisation des méthodes de travail, la Présidente a mis en avant un projet pilote mené avec le Comité des droits de l'enfant lors de l'examen des rapports de Sao Tomé-et-Principe, et qui a permis aux deux comités de formuler des recommandations conjointes sur des questions touchant les droits des filles. Une méthodologie a également été adoptée pour examiner les rapports des États parties en l'absence de leur délégation.

Mme Peláez Narváez a également rapporté que les présidents des 10 organes conventionnels des droits de l'homme ont réaffirmé leur décision d'établir un calendrier d'examens sur huit ans couvrant tous les États parties. Il a également été décidé de créer un mécanisme de coordination des organes conventionnels sur la simplification et l'harmonisation des méthodes de travail. La Présidente a ensuite appelé l'Assemblée générale à approuver des ressources supplémentaires pour les organes conventionnels, afin de répondre « aux attentes placées en nous » par les femmes du monde entier.

Dialogue interactif

À l'entame de cet échange, le Japon a demandé des exemples d'incidences positives de la procédure de présentation simplifiée des rapports, tandis que la Grèce a voulu savoir comment intégrer au mieux les questions de genre dans toutes les structures de l'ONU.

Alors que de nombreuses femmes se heurtent à des formes de discriminations multiples et croisées, que peuvent faire les États pour atténuer les risques visant les jeunes femmes en situation de vulnérabilité? a demandé l'Union européenne. Et quelle action lancer pour permettre aux TIC de contribuer au renforcement de la participation des femmes dans les processus de décision, a ajouté la Suisse. À son tour, la Norvège a émis ses inquiétudes vis-à-vis des pays qui ne présentent pas leur rapport périodique au Comité, appelant ce dernier à privilégier un dialogue plus constructif.

Après la Chine, qui a appelé le Comité à respecter les informations fournies par les pays et à éviter toute politisation des droits humains, la Fédération de Russie a souligné que les observations du Comité doivent se fonder sur le droit international, et non sur les opinions personnelles des experts, appelant ces derniers à éviter les terminologies ne faisant pas consensus.

Le Mexique s'est intéressé pour sa part aux stratégies les plus efficaces pour éviter tout recul et garantir aux femmes et filles une vie autonome et exempte de violences. La Malaisie a voulu savoir par quels moyens accroître la participation des femmes et filles à l'économie, avant que la Colombie demande des exemples de stratégies de mise en œuvre de la recommandation 38 du Comité. L'Ordre souverain de Malte a appelé à assurer la réédition de comptes des auteurs de traite d'êtres humains, tandis que Cuba s'est enorgueillie d'avoir été le deuxième pays à ratifier la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Répondant aux interrogations soulevées par les délégations, la Présidente du Comité a rappelé que le projet pilote mené de concert avec le Comité des droits de l'enfant avait permis de renforcer la coopération entre les deux organes conventionnels de traité. Si les sessions ne se tiennent pas nécessairement de manière simultanée, des points de contact ont été mis en place et ce projet a débouché sur la publication de plusieurs déclarations conjointes.

Après avoir rappelé que le Comité fournit des orientations aux États Membres quant à l'application de la Convention, elle a précisé que la prochaine recommandation générale du Comité portera sur les stéréotypes fondés sur le genre. Il s'agit d'une question délicate qui a donné lieu à des interprétations disparates a-t-elle précisé, ajoutant que le Comité a mis en place un groupe de travail sur l'identité de genre et l'orientation sexuelle. Elle a assuré que la question de l'accès égale aux technologies pour les femmes est prise en compte. Le Comité compte également formuler des recommandations en matière de violences sexuelles en temps de conflits armés et examine en interne les possibilités de renforcer le mandat de la Convention concernant les violences à l'encontre des femmes. C'est une question prioritaire, a-t-elle assuré. Par ailleurs le Comité publiera le 11 octobre, à l'occasion de la Journée internationale de la fille, une déclaration sur la protection de la vie, de la santé et de l'avenir des filles en réduisant les grossesses non désirées et en garantissant l'accès à un avortement sûr.

Enfin, revenant sur les remarques de la Russie, la Présidente a souligné que le Comité travaille sur la base d'un consensus, évoquant le processus conséquent de consultation entrepris avec les États et les acteurs de la société civile.

Déclaration liminaire suivie d'un dialogue interactif

Mme DOROTHY ESTRADA-TANCK, Présidente du Groupe de travail sur la discrimination à l'égard des femmes et des filles, a détaillé les points saillants de son dernier rapport intitulé « Inégalités de pauvreté entre les sexes: approches féministes et fondées sur les droits de l'homme », ainsi que les principaux éléments du rapport sur la « Situation des femmes et des filles en Afghanistan », qu'elle a présenté au Conseil des droits de l'homme avec le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme en Afghanistan.

Le premier rapport souligne le lien entre pauvreté et inégalités sexospécifiques, la pauvreté étant « mère d'autres inégalités », a relevé Mme Estrada-Tanck. Selon elle, cette relation entraîne les femmes et les filles dans un « cercle vicieux de discriminations », alimenté par les formes dominantes de pouvoir masculin, qui perpétuent les hiérarchies existantes. Le rapport encourage donc les approches féministes intersectionnelle.

Ce même rapport, a-t-elle noté, montre que la crise de la COVID-19 a provoqué une réévaluation des idéologies économiques dominantes, notamment de la position de l'État en tant qu'acteur dans la définition et l'affectation des ressources des politiques publiques, remettant en cause le concept de croissance économique illimitée.

À cette aune, Mme Estrada-Tanck a appelé à analyser les systèmes de pouvoir qui génèrent et reproduisent des relations inégales entre les sexes au sein des familles, des communautés, des institutions et des marchés. Il faut, selon elle, trouver des alternatives aux politiques et institutions économiques et sociales injustes. Le rapport préconise à cet égard une « économie féministe » et invite les États à s'orienter vers une juste distribution des richesses et à abandonner la consommation, la production et l'extraction excessives au profit d'un ordre commercial mondial équitable, de la justice fiscale, de la responsabilité des entreprises et de la réalisation du droit au développement.

Abordant ensuite le rapport sur la situation des femmes et des filles en Afghanistan, la Présidente du Groupe de travail sur la discrimination à l'égard des femmes et des filles a fait observer que le niveau d'inégalité institutionnalisée et de discrimination fondée sur le sexe dans ce pays « n'a pas d'équivalent dans le monde ». En Afghanistan, toutes les femmes et les filles sont « assignées à résidence », a-t-elle indiqué, ajoutant que l'oppression du régime de facto et l'incertitude liée à l'extrême pauvreté exacerbent leurs problèmes de santé mentale.

De surcroît, a poursuivi Mme Estrada-Tanck, les femmes et les filles de ce pays sont confrontées à la violence domestique, aux meurtres liés au genre, aux mariages forcés et aux mariages d'enfants, à la vente d'enfants, au travail des enfants, à la traite des êtres humains et à des migrations dangereuses. Face à cette situation qui fait craindre que femmes et filles soient victimes d'un crime contre l'humanité en Afghanistan, « nous avons la responsabilité collective d'agir maintenant avant qu'il ne soit trop tard », a-t-elle conclu.

Dialogue interactif

Dans la foulée de cette présentation, la Belgique s'est inquiétée des répercussions sur les femmes et les filles des campagnes de mouvements anti-genre partout dans le monde. Elle s'est interrogée sur la manière dont l'État et la société civile peuvent parvenir à contrer les reculs des droits des femmes motivés par des considérations politiques et idéologiques. Même son de cloche du côté des États-Unis et de la Macédoine du Nord, qui ont demandé au Groupe de travail comment il compte répondre à ce phénomène préoccupant.

La République dominicaine s'est ensuite alarmée de la progression de la désinformation liée au numérique, avant de s'enquérir des possibilités de lutte contre les discriminations à l'égard des femmes et des filles en ligne, insistant sur l'influence des mesures prises en matière de politique publique.

Préoccupés par les questions de pauvreté, un certain nombre d'États ont interpellé la Présidente du Groupe de travail à ce sujet. C'est le cas notamment de l'Espagne, qui a voulu savoir comment un écoféminisme basé sur les droits humains peut contribuer à mettre un terme à la pauvreté chez les femmes et les filles. Le Brésil a demandé des exemples de bonnes pratiques dans ce domaine, tandis que la Slovénie s'intéressait aux manières de contrer les disparités de genre qui ont une incidence sur la pauvreté. Comment garantir que les approches proposées en matière de réduction de la pauvreté seront transversales, s'est interrogé le Mexique.

Dans le même ordre d'idées, l'Union européenne a souhaité savoir comment combiner une approche fondée sur les droits humains et les efforts de développement durable, avant de s'enquérir de la situation en Afghanistan et de la manière d'appuyer les défenseurs des droits humains sur place. Enfin la Grèce a voulu en savoir plus sur les obstacles qui empêchent l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes et des filles, tant dans le droit que la pratique.

En réponse à ces questions et remarques, la Présidente du Groupe de travail sur la discrimination à l'égard des femmes et des filles a insisté sur l'importance des visites qu'effectue le Groupe de travail, notamment pour lutter contre la pauvreté. Ce faisant, le Groupe de travail recueille des témoignages de femmes sur le terrain et les implique dans ses processus décisionnels, a-t-elle expliqué. Mme Estrada-Tanck a invité les États Membres à s'inspirer de cette stratégie en impliquant en amont les femmes, notamment les demandeuses d'asile, les migrantes et les femmes issues des minorités, dans les processus politiques qui les concernent. Elle a également appelé les États Membres à appliquer de manière plus efficace le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui prévoit des obligations de non-régression des droits, en particulier s'agissant du travail domestique non rémunéré.

Après avoir exhorté les États à adopter des mesures fiscales et d'allégement de la dette en vue d'atténuer les inégalités femmes-hommes, la Présidente du Groupe de travail a souligné l'importance de garantir les droits à la santé sexuelle et reproductive, y compris en période de crise. Elle a d'autre part rappelé qu'en 2018, le Groupe de travail a été l'un des premiers à tirer la sonnette d'alarme sur les discriminations liées au genre. Citant l'Afghanistan comme « exemple extrême », elle a souhaité que l'apartheid de genre qui s'y déroule fasse l'objet d'une réponse multilatérale. Elle a enfin appelé de ses vœux une réforme de l'architecture économique et financière internationale, en demandant à ce que les femmes puissent y participer.

Déclaration liminaire suivie d'un dialogue interactif

Mme REEM ALSALEM, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences a indiqué que 50 pays appliquent des lois sur la nationalité qui contiennent des dispositions discriminatoires à l'égard des femmes, et que 24 d'entre eux refusent aux femmes le droit de transmettre leur nationalité au même titre que les hommes. Elle a signalé que le sexe et les lois sur la nationalité sexistes sont les principaux moteurs de l'apatridie, y voyant une forme de violence à l'égard des femmes et une grave source de discrimination.

En plus d'exacerber directement et indirectement la violence psychologique, sexuelle et physique, ces lois peuvent exposer les femmes et les filles à diverses formes d'exploitation et d'abus. Elles entravent l'enregistrement des naissances, la transmission de la nationalité, et l'accès aux services essentiels, compliquant en outre la garde des enfants. Qui plus est, l'apatridie et des lois sur la nationalité discriminatoires en matière de genre peuvent exposer les femmes et les filles à davantage d'exploitation et d'abus, notamment la violence domestique, le mariage d'enfants, la traite et la détention arbitraire, s'est-elle inquiétée.

La Rapporteuse a ensuite expliqué que ces lois trouvent leurs racines dans les valeurs patriarcales, l'exercice d'un contrôle démographique, les formes croisées de discrimination à l'encontre des minorités et des femmes ou encore la lourdeur des exigences administratives pour l'enregistrement des naissances ou l'acquisition de la nationalité.

Soulignant que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes établit le droit des femmes d'acquérir, de changer, de conserver ou de conférer leur nationalité à égalité avec les hommes, elle a exhorté les États concernés à lever leurs réserves aux articles de la Convention qui garantissent ces droits. Elle a également appelé les États Membres à signer les conventions de 1954 et 1961 sur l'apatridie. Les réformes entreprises par plusieurs États démontrent qu'il est possible de mettre fin aux lois sexistes sur la nationalité et à l'apatridie, a-t-elle affirmé.

Dialogue interactif

Dans un premier temps, l'Union européenne a demandé à la Rapporteuse de fournir des exemples de pratiques optimales de lutte contre l'apatridie.

Existe-t-il des exemples de mesures prises par des États pour traduire les textes sur le terrain, et comment peuvent-ils mettre en œuvre les recommandations du rapport, a voulu savoir la délégation des Pays-Bas.

La République dominicaine a fustigé les observations de la Rapporteuse selon laquelle le pays aurait imposé un cadre discriminatoire à l'encontre des femmes haïtiennes. La Constitution dominicaine ne fait aucune discrimination contre quelque nationalité que ce soit. D'ailleurs, 36% des naissances dans les hôpitaux publics sont le fait de mères haïtiennes en situation irrégulière ou en transit, ce qui prouve qu'elles bénéficient de soins sans discrimination, a invoqué le délégué.

Après les Émirats arabes unis qui se sont intéressés au rôle des organisations régionales et sous-régionales dans la lutte contre la violence contre les femmes et les filles, le Bangladesh a demandé à la Rapporteuse son avis sur les lois discriminatoires en matière d'asile, notamment celles qui empêchent les femmes d'échapper à la guerre et produisent une apatridie institutionnelle. Comment convaincre les pays de la nécessité de modifier leurs législations en matière de transmission de la nationalité de la mère à l'enfant, a voulu savoir la Belgique, l'Ordre souverain de Malte réclamant pour sa part des données ventilées sur l'apatridie.

La Rapporteuse a ensuite été appelée par le Canada à examiner davantage l'impact de l'apatridie sur les mariages forcés et les grossesses précoces, puis par le Pakistan à faire le point sur l'apatridie en situation d'occupation étrangère, la délégation pakistanaise notant que de nombreuses femmes au Jammu-et-Cachemire sont apatrides du fait de leur appartenance à l'islam.

L'Australie, le Népal et le Costa Rica ont réclamé des exemples de bonnes pratiques en matière de protection, tandis que le Mexique s'est intéressé à l'abus du terme aliénation parentale. Existe-t-il des mécanismes pour régler le problème de l'apatridie? a questionné l'Algérie. Et comment analyser les causes des violences contre les femmes et les filles? a questionné l'Estonie qui, s'exprimant au nom des pays nordiques et baltes, a également appelé à veiller à ce que les innovations technologiques ne discriminent pas davantage les femmes et les filles. Notant pour sa part que le rapport établit que les autorités estoniennes ont pris des mesures pour éliminer l'apatridie, la Fédération de Russie a appelé la Rapporteuse à se préoccuper des droits des non citoyens, victimes de diverses violations.

À son tour, le Koweït a critiqué le fait que le rapport affirme que des personnes apatrides font l'objet de discriminations au Koweït. Le paragraphe en question a été rédigé sur la base d'un rapport de 2019 qui indiquait que le Koweït n'avait pas rassemblé assez de données, a relevé la délégation qui a jugé inacceptable qu'un État soit décrit négativement par manque de données. Relevant en outre que le rapport indique que la Syrie n'octroie pas la nationalité aux Palestiniennes, la République arabe syrienne a expliqué que cette mesure visait à préserver leur droit au retour. Il en va de même pour le Liban, a-t-elle ajouté, affirmant par ailleurs peiner à comprendre le lien entre apatridie et violence sexuelle. L'Inde a jugé pour sa part non pertinente la référence faite au registre de ses citoyens. Et Cuba a souhaité connaître l'avis de la Rapporteuse sur les violences contre les femmes migrantes dans des pays très développés, tels que les États-Unis.

Dans ses réponses et observations, la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences, a regretté que les causes structurelles des nouvelles manifestations de violence contre les femmes ne fassent pas l'objet d'un examen suffisamment approfondi. Le patriarcat et la misogynie, des phénomènes qui continuent d'évoluer et de se transformer, sont parmi ces causes, d'où l'importance de demeurer vigilant, a-t-elle souligné. À cet égard, la Rapporteuse s'est dite prête à s'attaquer, entre autres, aux répercussions des technologies émergentes qui ont une incidence majeure sur la violence à l'encontre des femmes et des jeunes filles.

S'agissant des discriminations croisées subies par les femmes migrantes, souvent passées sous silence, la Rapporteuse a encouragé la mise en place de mécanismes d'accueils adéquats pour assurer la sécurité de personnes qui, comme les Afghanes, fuient la persécution. Elle a relevé que de nombreuses migrantes ne peuvent bénéficier de permis de séjour et sont donc forcées de vivre dans des relations abusives, citant, sans le mentionner nommément, un exemple de « mauvaises pratiques » d'un pays, qui a choisi d'exclure ces personnes des mécanismes de protection juridique. Pour ce qui est de l'aliénation parentale, elle a souligné le lien entre l'intérêt supérieur de l'enfant et la protection des femmes qui peuvent être l'objet de violence lorsqu'elles rentrent dans leur pays.

La Rapporteuse a ensuite évoqué le cas concluant du Maroc qui a retiré ses réserves à l'article 9 de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, qui mentionnaient des prétextes d'ordre religieux ou culturel. Appelant les États à éliminer les dispositions discriminatoires dans leurs législations, elle a salué la résolution adoptée en juillet 2023 par le Conseil des droits de l'homme (CDH) et a proposé aux États Membres de se réunir dans le cadre d'un « groupe d'amis de la résolution » afin de procéder à un partage de bonnes pratiques.

Enfin, pour ce qui est des données liées à l'apatridie, elle a renvoyé à son rapport qui mentionne les exemples pratiques du Kenya, de la Norvège et des Philippines qui ont mis en place des structures sur les statistiques et l'apatridie.

Débat général

S'exprimant au nom du Groupe des États d'Afrique, Mme ELLENI HENOK AREGA (Éthiopie) a mis l'accent sur les défis qu'affrontent les femmes et les filles apatrides ainsi que celles vivant en milieu rural, insistant sur le fait qu'elles n'ont pas voix au chapitre au sein des mécanismes de prise de décisions. Pour faire face à ces situations, elle a appelé à un financement nettement plus important des pays en développement, notamment par l'aide publique au développement, l'accès aux marchés, le transfert de technologies et la levée des mesures coercitives unilatérales. Constatant que la pauvreté touche les femmes de manière disproportionnée, elle a aussi dénoncé leur manque d'accès à l'électricité, à l'eau potable et à l'assainissement, mais aussi à la propriété de la terre, au crédit ou à la représentation politique.

Au chapitre des solutions, la déléguée a évoqué le Centre international pour l'éducation des filles et des femmes en Afrique, avant d'inviter la communauté internationale à soutenir cette initiative de l'Union africaine destinée à maintenir les filles à l'école. Elle a également appelé à ne pas oublier les femmes et les filles qui vivent dans des économies déchirées par la guerre, qui perdent leurs enfants avant cinq ans, qui meurent pendant la grossesse ou l'accouchement parce qu'elles n'ont pas accès aux services de santé, qui souffrent de discrimination en raison de leur séropositivité, qui sont victimes des changements climatiques, de la traite des êtres humains, de la prostitution infantile et qui sont victimes d'abus et d'exploitation sexuels.

En conclusion, elle a demandé aux États Membres d'élaborer des politiques qui soutiennent spécifiquement les femmes et les filles rurales et apatrides, afin de leur permettre d'acquérir des connaissances, d'accéder aux marchés internationaux pour leurs produits, de développer leur estime de soi et d'assumer la responsabilité de leur propre vie.

Mme HEDDA SAMSON, de l'Union européenne (UE), s'est réjouie que, cette année, le nombre de femmes occupant des postes de décision politique dans le monde ait atteint son plus haut niveau historique. Elle s'est également félicitée des révisions législatives opérées par de nombreux États pour éliminer la violence sexiste, y compris la violence domestique, saluant à cet égard l'alliance des pays d'Asie centrale destinée à mettre fin à la violence fondée sur le genre, qui a été lancée cet été en coopération avec l'UE. La représentante a toutefois regretté que, dans de grandes régions du monde, les femmes de diverses origines ethniques ou religieuses et les femmes handicapées restent largement exclues des opportunités sociales et économiques.

De son côté, l'UE insiste pour que l'égalité femmes-hommes soit fermement placée au cœur des discussions politiques et soit abordée dans le contexte des évolutions géopolitiques et des nouveaux défis de sécurité, a souligné la déléguée. Elle a ainsi rappelé qu'au cours de l'année écoulée, l'Union européenne a contribué à l'autonomisation et à la participation pleine, égale et significative des femmes et des filles avec sa directive sur les femmes siégeant dans les conseils d'administration. L'UE a aussi fait progresser la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité en augmentant le financement de projets visant à autonomiser les femmes dans la prévention des conflits, les négociations de paix et le relèvement postconflit, a-t-elle ajouté.

Assurant que l'UE continuera d'agir en tant que « leader mondial de la promotion de l'égalité des sexes », la représentante a appelé en conclusion les États Membres à « mettre plus de femmes aux commandes du navire » afin de « remettre la trajectoire collective dans la bonne direction ».

À suivre...